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écrire parler

C'est facile de parler un peu facile ou pas c'est facile et pas facile certains croient que c’est facile ils disent il est aisé de parler mais pas tant que ça car tout de suite on fait des difficultés au parler tout de suite on ne lâche plus le parler pourquoi ils ne peuvent pas se taire après avoir causé pourquoi quand on a quitté le simple le facile on ne se tait pas pour de bon?

 

On pourrait se taire après avoir lancé quelques mots, juste quelques phrases et disparaître, et que ces phrases aussi disparaissent, car en général ça tend à rester, même si on n’est pas tenu de rester nos phrases n’entendent rien aux injonctions, il faudrait des phrases qui n’entendent plus plutôt que des phrases qui parlent, des phrases encore plus creuses qu’elles laissent entrer tous les sons dedans pour les faire taire.

 

C'est plus facile de parler que d'écrire à c'qu'on dit, mais parce qu'on n’est pas entraîné, c’est par obligation qu’on parle, plus qu'on écrit, si on veut pas écrire on peut mais se taire c'est plus compliqué, déjà parce que se taire dans l'écrit tout le monde s’en fout, mais si vous vous taisez verbalement vous posez de suite un problème, un problème insoluble pour la vie en société, il faudrait pouvoir parler pour pas faire société, parler juste pour faire taire toute velléité, toute envie de faire société.

 

Le problème aujourd’hui c’est la littérature, toute cette littérature qui verse dans le social, c’est tout l’ennui de cette société écrivante et qui veut nous expliquer la socialité, qui veut nous démontrer par le biais du langage, de l’écriture, qu’il y a des problèmes sociaux et que la littérature peut faire quelque chose avec ça, toute la littérature verse là-dedans, sur dos même d’une pensée qui voulait le langage sur la crête entre l’homme et l’animal, quelque chose qui serait dans un vacillement, tout ça sur le dos du style, c’est-à-dire d’une façon de parler comme un étranger dans sa propre parole, comme une parole qui tourne à vide mais qu’on tient par la bride, une parole-cheval qu’on veut dresser, mais le cheval n’a rien à voir avec l’écriture et moi je sais pas faire de cheval, alors je tombe de cheval et c’est le fait de tomber du cheval qui fait qu’il y a écriture.

TXTCod a codifié ce texte, intitulé "Vague lente" : Un texte court qui demande plusieurs jours de lecture.

Tapez n'importe où pour vous téléporter sur le site.

De la part de TXTCOD, ce texte, intitulé ici Vague lente, qui fourmille à l'intérieur de courants sonores différents et remuants ; chaque mot ou groupe de mots a son image acoustique qui correspond ou pas au sens qu'il donne, car parfois c'est l'inverse total (comme une diode en polarisation inverse?), ou alors le son des mots guide vers le mot qui suit (mot d'une fin de phrase par exemple) et qui, lui, ne dira rien (en en disant trop!)  par son bruit qui fait sursauter le sens (et les oreilles du lecteur, sans aucun doute) si l'on déplace bien entendu le fameux mulot à molette... Bravo au TextCodeur pour cet ouvrage de patience!

HOTEL DE L’UNIVERS – HEDI CHERCHOUR. VANLOO EDITIONS. AVRIL 2024

Dans l'Hôtel de l'Univers, la vie est un putain de chantier !

  travaux en cours

1 - Je lis le livre d'Hedi Cherchour et je livre mes impressions sur son écriture, son style, ses moments rapides visionnés à la loupe.

Hedi Cherchour aime ramasser les phrases en quelques mots. Il y a d'un coup comme une explication, une lumière, une approbation à tout ce qui vient d'être écrit, à toutes les actions dites. C'est cela qui embrasse la phrase, la revisite, l'explique, mais cette explication nous ne l'attendons pas bien souvent. Elle monte seule dans notre regard et raconte cet intérêt qu'on pouvait avoir pour telle action. C'est comme une signature, celle de l'enfant bien souvent. Mais cette signature nous surprend nous lecteurs, elle nous intrigue au fur et à mesure des pages, nous fait finalement douter à cause justement qu'on interprétait différemment, ou que le petit personnage, cet enfant, voyait les choses autrement depuis son (ses) intérieur(s). Et on découvre ça en fin de phrase, sur quelques mots, trois fois rien. Le regard de l'enfant, sa pensée qui retourne tout.

Ce regard d'enfant (Farida) se maintient même à l'âge adulte.

Un Enfant myope mais qui voit l'immédiat des choses.

Son corps grandit mais son regard est toujours autant fulgurant. Il nous dépasse d'une tête dans le texte. Sa parole parle des langues, du problème des mots, les nouveaux mots du père. Elle nous parle des langues, celle que la mère ne peut comprendre, puisqu'exilée dans sa langue sienne au fond de sa cuisine et celle que ce père remâche obsessionnellent en roulant vers ses chantiers. Un moment, Farida écrit même : L'exil est un charabia.

 

Farida c'est un regard qui fouette le réel d'une situation, ses yeux tout ronds qui grossissent l'instant, ce qui fait qu'il y a parfois des effets de loupe, des ralentissements dans les actions qui tendraient à accélérer le train de la fiction. ("C’est vrai que quand j’écris, je tire une balle, au début la balle va vite et ensuite elle ralentie et on peut voir à travers son ralenti les dégâts stratosphériques. " Hedi Cherchour)

Peu importe qu'on ait vécu ou pas des situations similaires au final, ce qui importe, il me semble, c'est qu'on est retournés dans notre lecture. C'est là que réside l'étrangeté, dans ces spots qu'elle allume, ces focales qu'elle place telle une peintre qui dessine patiemment un détail, puis rire un trait et file ailleurs.

2 - Les personnages apparaissent puis disparaissent. Mais on reste attaché à eux (grâce au regard porté de la narratrice, Farida).

Ils sont très prégnants.

Et du père naissent de nouveaux personnages, de sa disparition viennent des doubles , drôles, inquiétants ou tristes, Yanis ou Soltan

Un peu des fantômes du père mais sans les responsabilités, des gens perdus qui réagissent à leur manière dans la France des années 90

Puis une sœur de Farida, Mouni.

C'est elle qui nous fait faire la traversée avec Farida jusqu'à la deuxième partie du livre.

Puis qui disparaît violemment.

Mouni représente bien la seconde partie en disparaissant tragiquement dedans.

3 - La disparition des personnages.

Au début il y a une épaisseur, une lenteur dans l'action même, qui est de moins en moins tenable au fur et à mesure de l'écriture ; les derniers personnages représentent ça. Ils apparaissent en coup de vent, disparaissent d'un trait de plume (Caroline de Sav, Doumé d'Endoume).

En fait, les personnages ont de moins en moins de place, ils rétrécissent au fur et à mesure que le personnage principal soit à sa vie. Elle en a fini avec son job de narratrice, c'est sa vie qui apparaît en fait, jusqu'à rouler même le lecteur.

"La vie, c'est un peu la séquence du spectateur".

                                                      Hedi Cherchour.

Le lecteur est piégé, déposé sur le chemin pour qu'elle poursuivre son destin, son "mektoub", comme elle le dit souvent au début du roman, en parlant de son père ; comme si en fait cette fin était une dernière farce faite à la fiction.

Les personnages taillent la route carrément.

C'était pas un roman, c'était une série télé et la fin toute pimpante c'est sur un offshore rouge, super visible, qu'on voit partir tout ce beau monde. Il "n'y a plus d'obstacle", dit encore Farida. "Pas de mur en mer", vous vous êtes toutes et tous faits berner les gens ! L'esprit de Yanis le flambeur est plus que jamais présent, sa trace comme une nappe de gazoil sur toute la Méditerranée d'aujourd'hui.

Il a floué tout le monde le livre. Mais en même temps, ça réussit un doublé avec le fait que ça se passe plutôt bien. La fin est bien, c'est une belle fin, presqu'un conte de fée, parce qu'il faut que ça se passe bien, comme une peau qu'on a fini par retirer. Une peau crasseuse dont on se débarrasse enfin dans la mer, pour vivre d'autres aventures. La honte est presque partie. Elle est partie grâce a la mort (Farida au terme du voyage ferme les yeux, ce n'est pas pour rien que c'est dit! Elle ferme les yeux et dit : "on va peut-être tous crever, il n'y aura plus d'histoire,..." c'est-à-dire il n'y aura plus d'emmerdes.

Fin de l'écriture.

 

 

solo gros trou

 

La petite bande des écrits, les doigts et l’écrire-bien qui vient dans du pas-nous.

 

Poème-brouillon pour préparer le son de la pensée qui vient dans l’écrituré.

 

Nous déparlons depuis la mort de nous.

 

La poésie est une petite bande et nous écrivons à partir de là. Nous écrivons depuis nos mains, depuis la petite bande des doigts qui vient parler dedans nos bouches. Car la poésie vient dans la bouche pour faire parler les dehors. La poésie c’est la petite bande qui vient des dehors par la bande des morts et nous écrivons, c’est-à-dire nous traçons, nous eructons, nous gesticulons, nous dessinons, nous verbigérons, nous peignons des langues vers les dehors.

 

Puisque la poésie c’est animer la petite bande en nous.

 

La bande des écrituries depuis des parlers qui sont venus mourir en dedans de nous.

 

Et la poésie c’est cette petite bande des morts qui nous pousse à vivre à l’air libre de l’écrit pour parler dans les petites langues en nous, car la poésie c’est les petites langues qui parlent à l’intérieur de nos bouches.

 

La poésie c’est le vide qu’il y a dedans nos bouches car on ne pourrait pas écrire sans le vide.

 

Si dedans n’était pas vide on ne pourrait rien faire que se taire et laisser tout le parler nous remplir.

 

On pourrait que papoter et la poésie ça n’est pas que papoter, la poésie c’est se taire aussi.

 

C’est se taire dans tout le papoter.

 

La poésie c’est faire du papotaire contre tout ce qui veut nous parler.

 

La poésie c’est faire un gros trou de papotaire dans tout ce qui voudra toujours parler sans nous.

 

 

Petite bande est dans les doigts. Petite bande c’est la main dans laquelle poussent des morts qui viennent dans des doigts non-nôtres. Nous sommes avec les doigts non-nôtres qui s’agitent depuis la bouche non-mienne. Nous parlons depuis un non-nous fait des morts non-nôtres avec une bouche non-mienne.

 

Nous ne sommes pas nous-mêmes à parler les langues mortes sauf à faire ressortir depuis les dedans des écrits qu’on trace sur les mains & la bouche.

 

Le parler est une bande qui parle. Le parler est dans les doigts non-nôtres qui viennent dans l’intérieur de nos bouches. Nos petites bouches écrivent depuis les morts qui poussent dans les mains qui s’agitent depuis dehors pour nous écrire vers dedans. C’est nous qui écrivons en dedans pour que se dessine le poème qu’on entendra dehors.

 

Ecrire depuis la main la bouche.

 

Ecrire depuis la bande des parlers qui passent.

 

Ecrire depuis les voix mortes qui poussent de partout.

 

Ça pousse depuis dehors et ça va vers nous. C’est un nous dans l’écrit dessiné. Un nous dans le peint le dessin et l’écriturien qui sortent par la bande. La petite bande des écrits et parlers morts qu’on fait vivre en poèmes.

 

Nous écrivons depuis la tête qui parle en nous. La tête et les membres. Nous écrivons depuis la bouche et les doigts dans les mains. Nous poussons dans l’écrit depuis les morts qui parlent de partout. Ça pousse à sortir dans les langues qui traversent le vivant par l’écrit le parler le dessiné. Nous écrivons des poèmes délabrés. Nous dessinons depuis les littératuées qui sortent de nous par la bande. La petite bande des poèmes qui nous sort de partout.

 

J’écris depuis la mort de nous. La mort en bande dans les paroles qui viennent nous mourir dans l’écrit. J’écris depuis la mort de moi qui bande dans les doigts. J’écris depuis la bouche et les mains non miens. J’appartiens aux langues mortes miennes qui viennent de dehors. Le dehors vient dedans pour sortir mes écrits des organes. Tous les organes veulent sortir du corps quand je parle.

 

Petite bande est dans les doigts. Petite bande est la main. Petite bande c’est les morts qui nous poussent dans la main. La main pousse dans la bouche aussi avec la petite mort. Toutes les paroles viennent nous mourir dedans. Petite bande est la lutte contre les parlers morts en nous qui viennent des dehors.

 

Comment écrire avec les mains. On ne peut pas vraiment écrire hors du dressage. On a dressé nos mains. On nous a dressé les mains pour l’écrire-bien. C’est dans l’écrire-bien qu’on vit avec nos mains. Nos mains remplies de morts et nous dressés à remplir l’écrire-bien. On remplit l’écrit de notre adresse. Nous nous adressons aux morts en parlant dans l’écrire-bien. Mais les morts entendent rien. Ou bien c’est nous. C’est nous qui pipons rien. On pipe rien des morts qui peuplent nos mains tout ça à cause de l’écrire-bien.

 

La poésie veut faire un gros trou dans tout ce qui parle en nous.

Petite bande, éditions P.O.L, mai 2023

petite bande pol

« Petite bande » est constitué d’un ensemble de textes, de poèmes, de phrases sur les doigts, les mains, les visages. « Petite bande » est formé d’écrits, souvent dessinés autour de profils « perdus ». « Petite bande », ce sont des dessins « écriturés », faits de binettes et de mots écrits à la main ou tapés à la machine. « Petite bande » est fait d’écrituries, d’échos de voix sur la montagne, de pensées projetées par les éléments, beaucoup de traits, de coups de feutre, de tracés au blanco sur des pages noires. Il est question de lumière, de formes ; ça questionne les dehors, les dedans. Le thème qui revient est celui de l’écriture, celle qui vient des dedans. Les paroles, elles, viennent des dehors. Les morts, eux, sont partout, qui parlent même en nous. Il est beaucoup question de corps aussi, de rire aussi, et de poésie. « Petite bande », c’est la poésie, la poésie qu’on lit ou qu’on regarde. « Petite bande » parle de l’écrivain, de l’artiste, à qui Charles Pennequin tente de rendre hommage, à travers des chapitres et des styles différents, et par des poèmes ou des dessins. Des dessins-poèmes.